Les moisissures sont naturellement présentes dans les grains et les fourrages, notamment sous forme de spores. Elles se développement sur un grand nombre de substrats, cependant les conditions de toxinogénese (synthèse des mycotoxines) sont plus strictes et varient en fonction de plusieurs paramètres (Tabuc, 2007) (Boudra, 2009) :
- L‘humidité : l’activité de l’eau, c’est-à-dire, la quantité d’eau disponible dans le fourrage pour les micro-organismes est déterminante. La production de mycotoxines nécessite une activité hydrique supérieure à celle permettant le développement de la moisissure. Par exemple, Fusarium graminearum se développe dans des substrats dont l’activité hydrique se situe aux alentours de 0.93, or, la production de déoxynivalénol (toxine produite par ce champignon) est importante pour des Aw de l’ordre de 0.995. Le même constat a été réalisé pour l’espèce Penicillium verrucosum (croissance à partir de 0.80) et la production d’ochratoxines Aw > 0.995 (Ramirez et al., 2006). En pratique, une teneur en eau supérieure à 15% pour un foin constitue un risque de développement de moisissures (Boudra, 2009).
- La température des fourrages au moment de la récolte et pendant la conservation est significativement liée au développement des moisissures. Leur capacité à croître est généralement comprise entre 20 et 25°C, bien que certaines ait des spectres de croissance beaucoup plus larges. Par exemple, Aspergillus flavus, principale moisissure productrice d’aflatoxine, se développe de manière optimale dans des conditions chaudes (33°C). Elle peut cependant se développer sur un spectre allant de 10 à 48°C (Anses, 2012). De même, Penicillium verrucosum croît dans des conditions idéales, à des températures plus faibles, de l’ordre de 20°C. La température optimale pour la synthèse de mycotoxines est généralement proche de celle nécessaire à la croissance du champignon. Les conditions de toxinogène optimales pour Aspergillus flavus et Penicillium verrucosum sont respectivement de 25°C et 20°C (Anses, 2012). Elle peut également influencer la proportion de toxines susceptibles d’être produites par une même souche. L’espèce Fusarium graminearum a une température optimale de croissance de 25°C : la synthèse de la zéaralénone peut avoir lieu dès 15°C (optimum de 25°C) et celle du déoxynivalénol (également produite par ce champignon) sera majoritaire à 28°C (Pfohl-Leszkowicz, 2001).
- La composition du milieu, notamment la proportion de glucides et de lipides, est primordiale dans les processus de synthèse des mycotoxines. Ainsi, le risque mycotoxique au champ est plus important lorsque la récolte est tardive, puisque le végétal est plus riche en nutriments (Boudra, 2009). La présence de certaines molécules contenues dans le végétal peut également influencer la synthèse de myxotoxines : l’acide phytique (molécule principalement présente dans l’enveloppe des grains servant de stockage au phosphore et autres minéraux) diminue par exemple la synthèse d’aflatoxine par Aspergillus parasiticus et flavus alors que la proline (molécule impliquée dans le développement des végétaux et notamment en réaction au stress hydrique) la stimule (Pfohl-Leszkowicz, 2001).
- La conservation du fourrage (rapport CO2/O2) : les moisissures sont différentes en fonction du mode de conservation du fourrage (sec ou humide). Leur développement peut évoluer rapidement pendant la conservation et l’utilisation. En théorie, dans les deux cas, les conditions ne sont pas favorables au développement des moisissures : le foin a une teneur en eau insuffisante pour favoriser leur croissance, et le caractère aérobie (développement en présence d’oxygène) de la plupart des moisissures limite le risque fongique dans les ensilages correctement conservés (tassement déterminant). Néanmoins, des conditions de récolte humides (présence de terre, …) et le désilage des silos (vitesse d’avancement du front d’attaque faible), sont des facteurs déterminants dans la production de mycotoxines (Boudra, 2009).
Les facteurs environnementaux sont déterminants dans la production de mycotoxines par les moisissures (Mecheri, 2021). Leur maîtrise n’est pas évidente, notamment car elles sont fortement dépendantes des conditions climatiques lors de la fauche, cependant elles sont déterminantes afin de limiter les effets sur le troupeau.